Journée bosphorienne, pleine de dauphins, de bateaux et de soleil. Ou comment rendre savoureuse la vie dans une immense agglomération.
Rive asiatique, en face des restes du château imposant dont les murailles abriteraient une ville et qui surplombe le Bosphore, se trouve le « village » d’Anadolu Hisarı, une porte monumentale encadrée de deux belles tours de pierre, des rues charmantes.
Un embarcadère tout droit sorti d’un tableau tranquille accueille le « tekne », le bateau qui vient nous chercher. C’est une petite troupe de 11 personnes qui monte à bord. Le tekne repart de suite et nous emmène, dans le soleil et sous une petite brise, vers la Mer Noire.
Tandis qu’on longe tour à tour les rives asiatique et européenne, chacun étend sa serviette en haut au soleil ou s’installe autour d’une table à l’ombre en bas. Aujourd’hui une petite trentaine de personnes sont à bord. Un buffet de petit déjeuner est ouvert, le petit déjeuner traditionnel turc composé de fromages et d’olives, accompagnés de pain, de confiture, de tomates et de concombres.
C’est déjà une véritable petite croisière qui permet de rêver en admirant les « yalı », simples maisons ou grands palaces au bord du Bosphore, dont le jardin ou la terrasse ont un embarcadère privé. Par endroits de grands pans de forêts, zones préservées … par l’armée turque qui est propriétaire de nombreux espaces à Istanbul ou juste autour.
Lorsque la Mer Noire est en vue, les eaux commencent à s’agiter. Des ailerons noirs et brillants sortent de l’eau. Un peu partout des bandes de dauphins se laissent apercevoir l’espace d’un petit bond tranquille. Les plus proches passent à quelques mètres seulement du bateau, les plus nombreux doivent être une bonne trentaine, bien à l’écart des routes maritimes. Certains sont très grands, d’autres de taille plus modeste à priori. Fascination.
Quand l’ancre est jetée quelque part près du rivage en Mer Noire, les plus impatients, ou les moins frileux, ou les plus sportifs … descendent l’échelle en maillot de bain et vont goûter l’eau. Passé le choc thermique, elle est déjà excellente. On y reste un long moment, émerveillé de la chance d’être là, à nager dans la mer, après une semaine de canicule à concilier tant bien que mal les transports en commun et la chaleur.
Les bras en croix, faire la planche en regardant passer les goélands. Nager à la poursuite des dauphins que l’on a vu passer au loin. Remonter l’échelle, se sécher au soleil. Ouvrir un livre. Somnoler. Faire une partie de « tavla », le backgammon.
C’est déjà l’heure de déjeuner, les odeurs de grillades ouvrent l’appétit, déjà bien aiguise par la nage. Une partie de cartes, quelques nouvelles baignades et trop tôt le bateau repart dans la lumière de cette fin de journée.
Les rives du Bosphore défilent comme dans un film magnifique, la ville se dévoile à nouveau. Les vagues soulevées par le passage d’autres bateaux nous font tanguer et rouler en tous sens. Un gigantesque pétrolier vide, très haut sur l’eau, nous dépasse. Le pont nous enveloppe de son ombre.
La silhouette de l’embarcadère se rapproche inexorablement. Les yeux pleins de beauté, la peau chaude et salée, nous débarquons. Huit heures hors de la ville, les pieds loin de la terre.
Le paradis sur terre n’est jamais bien loin …
04 juin 2006