Last updated on 15 septembre 2019
Dans la série Il y a tout juste 10 ans – Archive Québec, 4 août 2009.
Le Festival des rythmes du monde à Chicoutimi, c’est dix jours de concerts gratuits, dans la légendaire rue Racine et sur le port. Eh bien oui, le Saguenay avec son histoire d’ancien Royaume, si obscure soit-elle, peut bien avoir ses légendes, il me semble. Ou sinon, créons-les !
La rue Racine, avec ses commerces sympathiques à l’européenne, bordée de quelques hauts immeubles, se transforme alors en salle de spectacle en plein air. Une scène disposée à chacune de ses extrémités, le virage en son milieu empêchant les sons de se télescoper. Entre les deux concerts une succession de stands de produits du monde, un peu alternatifs comme souvent, les inévitables buvettes, et un joyeux brouhaha de tous les âges.
Sur la promenade du port, d’autres stands forment un petit village, les jeux d’eau attirent les rires des enfants, la petite ferme reçoit son lot de visites émerveillées. Le fjord préside à toutes ces activités, impassible. Le trampoline géant attend le chaland, une jeune fille y travaille, qui est revenue d’Afrique il y a quelques mois à peine. Une femme africaine était à Ouagadougou également lors du Fespaco, le festival de cinéma de l’Ouest africain. Retrouvailles, émotion à demi mots de se revoir, ici, là-bas. Le monde est à la fois si grand pour une seule vie et si petit quand on parvient à y retrouver quelqu’un qui vient de loin !
Le concert ce soir devrait avoir lieu au port, malgré la pluie, malgré le tonnerre et les éclairs illuminant comme en plein jour, l’espace de quelques instants, les visages et les parapluies. Devant la scène peuplée de pupitres abandonnés et de chaises vacantes, le public, assis obstinément sur les sièges en plastiques, absorbant les gouttes l’une après l’autre, attend les premières notes. Il y a foule. Pour une musique d’orchestre, celle du Cirque du Soleil. Qui dira que le public est mort, après cela, que les gens ne savent plus vivre que devant leur poste de télévision ? Ici, en cet instant, la preuve qu’en dehors de toute relation d’argent, en dehors de tout confort, la culture a sa place.
Mais le plus drôle c’est, en s’informant, d’apprendre qu’en raison de l’orage les instruments ou le système de son ne pourra pas fonctionner. Fou rire donc en se demandant ce que tous ces gens attendent sous la pluie, car l’orage semble parti pour durer, et de fait il a résonné toute la nuit, innondant les rues et les ruisseaux … Être ensemble sous la pluie battante, une buvette ouverte non loin, est un concept de festivité encore mal exploré, après tout !
© Gwen Caillet 2019 – Tous droits réservés.