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Le camp du kilomètre 50 : collecte de bleuets

Posted in Canada, Québec, and Voyages

Last updated on 15 septembre 2019

Dans la série Il y a tout juste 10 ans – Archive Québec, 20 août 2009.

Loin dans le bois, à 50 kilomètres de toute civilisation, un camp s’installe sur un bout de terrain sablonneux. Des caravanes, tentes, roulottes et autres cahuttes se pressent autour de la cabane de l’acheteur de bleuets sauvages. Il y a des chiens, des enfants, des vélos abandonnés et même un vendeur de hot dogs.

Tout est enfoui sous une épaisse couche de poussière déposée par les camions forestiers, mais on subit cela de bonne grâce : sans les camions pas de route, sans route pas de bleuets, sans bleuet pas d’argent. Aux premières lueurs du jour les ramasseurs de bleuets s’en vont vers leurs talles secrètes (une talle est un endroit plein de bleuets, une information que chacun garde précieusement pour soi). On part muni d’un peigne, sorte de patte d’ours filtrant les gros bleuets des petits et munie d’un petit réservoir pour les recueilir. Dans l’autre main on tient une sorte de gros panier en fibre de verre, et de temps à autre on va vider le panier dans un des cageots mis à disposition par l’acheteur.

C’est un travail rude pour le dos et les mains, mais agréable encore tant que le soleil ne se fait pas trop agressif. L’après-midi est difficilement soutenable. Mais pour beaucoup, le pire est encore la présence de tous les insectes, de la nuée de moucherons aux taons vrombissants en passant par toutes les sortes de bestioles ailées susceptibles d’aspirer le sang ou d’arracher un morceau de chair. Et aucune étoffe, aucune crème ne protège complètement. Mais à condition d’y mettre un peu de bonne volonté, on peut oublier la présence des insectes et profiter des odeurs de la prairie, des vagues infinies de vertes forêts qui se perdent à l’horizon, des oiseaux curieux qui viennent un moment nous tenir compagnie.

Puis la journée finie on rentre au camp, on fait peser les caisses de bleuets, la paie est maigre cette année et les prix sont trop bas. Jusque dans le bois la mondialisation fait sentir ses effets : la concurrence des bleuets d’Argentine a fait chuter les cours, et la crise a mis bien des travailleurs au chômage, ils n’ont pas le choix de venir tout de même gagner ce qu’ils peuvent ici.

Alors on fait avec ce que l’on a, tout le monde se baigne dans la petite rivière, au soleil, les enfants courent et les adultes rient. Il y a toujours le plaisir d’être ensemble, heureux loin des problèmes et de l’agitation du monde, du moins jusqu’au retour.

© Gwen Caillet 2019 – Tous droits réservés.

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