Last updated on 1 novembre 2023
Il a fallu quelques heures pour tout préparer et fermer l’appartement. Pour reprendre la route. Direction le sud, en ligne droite. Jusqu’à Saragosse, que du connu. Rien de très beau tout d’abord, mais c’est déjà l’Espagne de l’intérieur, sans le moindre doute.
Il a fallu passer les environs de cette ville pour rencontrer les premières surprises. Heureusement, il y a quand même l’Ebre qui coule, sauvage et fier, sortant parfois de son lit. Heureusement, l’histoire antique applique une couche de joli vernis sur un présent parfois un peu triste. Ou pas, si l’on en croit les récits des nuits de fêtes … Heureusement, les noms ici font rêver, dans toute leur diversité.
Les sols aux alentours de la grande ville semblent victimes de la folie des hommes. Nus, ayant perdu leurs couleurs et leur végétation. Le ciel même est encombré des fumées des usines, de la pollution urbaine, des brûlis de bords de champs.
Mais des surprises ? Le long de l’autoroute menant à Madrid, ce berger menant son troupeau de moutons, le chien à ses côtés, un âne suivant l’ensemble, chargé d’un bât. L’emblématique silhouette du noir taureau se découpant sur une éminence. Les premiers arbres en fleurs, sans doute des amandiers.
Puis la poésie s’en mèle. De lourds nuages noirs succèdent aux ciels enfumés. La terre de plus en plus rouge. Des vergers fleuris d’un horizon à l’autre, dans des tons de rose pâle. Une tour ronde qui vient coiffer une haute colline. Un épervier pique vers le ravin, sans se soucier des humains trop pressés. L’odeur poussiéreuse de la pluie entre par la fenêtre. Ici, il ne pleut pas si souvent. La route coupe dans la roche, une coupe nette, droite, qui laisse voir tous les plis et replis de l’épiderme terrestre. Arrosés par la pluie, ces rochers prennent d’incroyables couleurs, comme un arc-en-ciel minéral généralement invisible, parfois révélé.
C’est la magie de la route, toujours renouvelée.
L’étape sera courte, cependant. Un détour révèle un site qui ne me conviendra pas pour dormir, mais j’admire au passage le magnifique monastère cistercien fortifié. Puis les hasards du jour me mènent à Medinaceli, au passé romain avant d’être maure, au charme intact dans le silence de la morte saison. Seuls se font entendre les cloches de l’église et les choucas revenus pour la nuit sur ses hauteurs.
Se perdre dans ce village est une chance, tout y est motif à émerveillement, de l’architecture aux ruelles, des vues aux façades végétales. La nuit sera froide, mais douce comme une nuit de voyage.
L’Espagne, toujours, aux passés multiples et entremêlés, au présent multiforme et complexe. Aux charmes inépuisables pour qui sait l’aimer.
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